02/02/23

Quelles conséquences de l’envolée des taux sur le marché de l’immobilier ?

Étape presque indispensable pour devenir propriétaire, l’obtention d’un crédit immobilier devient de plus en plus compliquée. Face à l’instabilité économique, les taux d’emprunt s’envolent et les taux d’usure restent bas, empêchant de nombreux Français d’accéder à la propriété. Décryptage d’une situation qui bouscule tout un secteur aux cotés de Tony Gaydu, Directeur commercial chez Premium Promotion.

Les taux d’usure – taux maximal auquel un prêt peut être accordé en fonction du montant emprunté, de la durée d’emprunt et de la catégorie de prêt – ne semblent aujourd’hui pas adaptés à la hausse des taux d’emprunt ?

Tony Gaydu : C’est le moins qu’on puisse dire ! À cause de l’inflation, les taux d’emprunt ont augmenté au cours des derniers mois. Malgré le relèvement des taux d’usure en octobre 2022 (3,05 % pour un prêt sur 20 ans, 3,03 % pour un prêt de moins de 20 ans), de nombreux dossiers immobiliers ne sont plus acceptés par les banques et les besoins d’apports ne cessent de grimper. Résultat ? Sans surprise, une baisse du nombre de transactions…

La situation est compliquée pour les acquéreurs, mais elle l’est aussi du côté des promoteurs immobiliers : quel est le principal problème rencontré par les professionnels ?

TG : Pour des raisons que nous connaissons tous, les coûts de construction sont en hausse, notamment à cause de l’augmentation du prix des matières premières. Les promoteurs immobiliers doivent donc faire face au dilemme suivant : alors qu’il faut construire de manière toujours plus performante et respecter des normes énergétiques toujours plus exigeantes (et c’est une bonne chose !), le produit final lui doit continuer de ne pas afficher un prix trop élevé pour répondre aux attentes des acheteurs…

Sans compter que, si l’attention se porte beaucoup sur les ventes aux particuliers, la situation impacte également d’autres volets immobiliers essentiels…

Tout à fait, car à la baisse importante des ventes aux particuliers s’ajoute celle (encore plus conséquente) des ventes en bloc: la chute atteint 54,6 %. Là aussi, tous les postes de ventes sont concernés. La Fédération des Promoteurs précise que la baisse des ventes aux bailleurs sociaux laisse craindre une offre nouvelle très faible de logements locatifs sociaux. Il en est de même pour les ventes en bloc aux investisseurs institutionnels, loin d’être en mesure de prendre le relai des dispositifs d’investissement locatif destinés aux particuliers – comme le Pinel.

 

Je voudrais pour cela partager l’analyse de Pascal Boulanger, Président de la FPI France, car je partage son sentiment : « La stratégie de Bercy consistant à privilégier les investisseurs institutionnels (LLI) au détriment des particuliers (Pinel) est anéantie. Les investisseurs institutionnels désertent, au moins temporairement, le secteur résidentiel, les taux de rendement étant en forte baisse avec la hausse des taux d’intérêt et des coûts de construction ». 

En tant que promoteur, comment s’adapter sans léser les futurs acquéreurs ?

TG : C’est tout l’objet des réflexions que nous menons en ce moment chez Premium Promotion, et le défi n’est pas simple à relever. La solution de facilité pour maîtriser nos prix serait de rogner sur la qualité. Des finitions moins nobles, des matériaux moins durables, des équipements moins performants… Mais ce n’est vraiment pas notre philosophie. Cela fait plus de 13 ans que l’on innove pour créer des bâtis plus responsables à des prix qui restent accessibles, ce n’est pas maintenant que l’on va renoncer ! Au contraire, cela nous pousse à aller plus loin dans notre démarche. Par ailleurs, il me paraît plus essentiel que jamais de penser au coût d’une opération dans sa globalité, en prenant en compte son environnement et tout son cycle de vie, pas juste la phase de construction.

 

La question de l’implantation, par exemple : si l’on a une résidence dans un quartier bien connecté au centre-ville ou à la ville la plus proche, à proximité d’une station de métro ou d’une gare, on permet aux futurs acquéreurs d’être moins dépendants de leur voiture pour leurs trajets domicile-travail.

Résidence au coeur du centre-ville de Toulouse

Vous parlez de prendre en compte tout le cycle de vie d’une opération, mais est-ce vraiment possible ? Quand on sait qu’un bâtiment va « vivre » plusieurs dizaines d’années…

TG : C’est tout le challenge du métier de promoteur immobilier ! Oui, nous sommes en permanente évolution, et certains changements arrivent bien plus vite que prévu : en quelques mois, le Covid a rendu indispensable chez les acquéreurs la possibilité d’avoir un vrai espace de travail à leur domicile. La seule certitude que l’on peut avoir, c’est que nos modes de vie vont continuer d’évoluer. Notre travail est de l’anticiper au mieux – en intégrant obligatoirement les questions environnementales et la mobilité en particulier – et de penser des espaces qui pourront connaître plusieurs vies, plusieurs aménagements… D’où l’intérêt de concevoir des bâtiments dont la durabilité est maximisée. 

Quel est votre point de vue sur les mois à venir ? À quoi peut-on s’attendre ?

TG : En toute honnêteté, je ne vois pas la situation s’améliorer dans les mois à venir, que ce soit côté acheteurs ou côté promoteurs. Tant que le gouvernement ne mettra pas de plan en œuvre pour faciliter le bon déroulé des opérations et des transactions immobilières… Chez Premium Promotion, nous misons sur la transparence avec nos clients pour les informer et les accompagner au mieux dans cette période compliquée pour un achat immobilier. Jusqu’à présent, nous sommes fiers de pouvoir continuer à mener des programmes ambitieuxnotamment sur le plan environnemental comme avec Natura, sans avoir dû faire l’impasse sur nos exigences en matière de qualité ou sur l’accessibilité de nos tarifs. Ça reste notre horizon pour la suite des événements !

Résidence avec serre végétalisée sur le toit

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